Lorsque mes parents se sont rencontrés, mon Père, Mexicain David Rrodriguez Patiño, et ma maman Marie-Brigitte, Versaillaise, n’avaient rien en commun. Mais ils se sont mariés et très vite ils se sont séparés. Mon père nous a abandonné et pendant 20 ans j’ai pas eu du tout de nouvelles de lui, à part un appel à 1h du matin quand j’avais 15 ans.
“je crois que c’est toi qui peut pas comprendre”
Un jour le téléphone sonne et j’ai compris que c’était mon oncle, le frère de mon père, qui m’appelait et qui voulait me payer le billet pour aller au Mexique. C’était l’occasion inespérée de retrouver ma famille, de retrouver mes racines. J’ai retrouvé mon papa avec qui on s’est fortement engueulé. A un moment donné, on était à table, moi je comprenais pas tout ce qui se disait en espagnol, ils parlaient très vite, et il me dit en français : « nan mais tu peux pas comprendre, c’est la famille ». Dans mon cœur je me suis dit : moi je peux pas comprendre ce que c’est la famille ? et alors toi qui nous a abandonné, je crois que c’est toi qui peut pas comprendre ce que c’est que la famille. Et puis si je parle pas espagnol, c’est quand même ta faute. On s’est tellement engueulé que à ce moment-là j’ai décidé qu’il valait mieux pas trop parler, plus parler des sujets qui fâchaient. Et pendant 10 ans on a préféré parler de la pluie et du beau temps. Mauvais calcul, au Mexique il fait toujours beau.
“Je me suis senti coupable”
Pendant 10 ans j’avais l’occasion de retrouver mon père réellement. Quand je récite le Notre Père : « Pardonne-nous nos offenses, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensé. » je sentais que je ne pouvais pas tout seul pardonner à mon père. Je me suis senti coupable de ne pas l’avoir aimé assez. Et je pense que c’est pour ces choses-là que j’avais besoin de prier pour lesquelles j’avais besoin, on appelle ça « restauré ». Moi j’ai jamais dit à mon père que je l’aimais. Je l’ai jamais pris dans les bras, je lui ai jamais dit en face que je lui pardonnais donc évidemment je pouvais pas savoir si je lui avait pardonné.
“Je me suis senti effectivement adopté par Dieu.”
Au moment où il est tombé très malade il y a 4 ans, il allait mourir, là je me suis rendu compte que j’avais cette grosse blessure qui se ravivait. Et vient le jour de la Pentecôte, dans une église où je viens prier. Et Samuel Olivier, qui est un chanteur qui fait la louange, cette musique qu’on adresse au ciel, était en train de créer son album qui s’appelait « Abba Père ». Lorsque Samuel Olivier commence son chant « l’amour de notre Père » par ces paroles : « j’étais orphelin, toi tu m’as adopté ». C’est sûr moi j’étais orphelin, mon papa venait de décéder. Et c’est sûr que je me suis senti effectivement adopté par Dieu. Ces paroles, elles m’ont bouleversé parce que ces mots mettaient ma blessure en relief. Je me sentais pas seulement orphelin physiquement, je me sentais orphelin dans mon âme. Je me sentais abandonné. Ce morceau-là : « l’amour de notre père » qui est devenu le déclic pour une prière.
Dans ces cas la y’a toujours un prêtre ou un pasteur qui dit : « si y’en a qui veulent s’approcher pour qu’on prie sur eux, qu’ils le fassent maintenant » et moi je me suis senti tiré par la chemise et je m’avance, c’est un français, un blanc, qui prie sur moi et il se met à parler avec l’accent de mon papa. Pas l’accent espagnol « la casa de papel », l’accent mexicano. « voy a orar para Vicente porque tu senor dios, tu lo conoces » (Je vais prier pour Vincent, parce que toi seigneur, tu le connais) en fait il s’est avéré que c’était juste le Français de l’Eglise qui avait épousé la Mexicaine de l’Eglise. Mais dans mon cœur ça a fait aucun doute : c’était l’outil, l’instrument que Dieu avait choisi pour me rétablir, pour me dire j’ai compris, tu as une souffrance sur la paternité, tu ne sais pas si tu as pardonné, bah j’ai compris, maintenant prie. J’ai tout compris, j’ai prié. Je me suis confessé encore une fois. J’avais cette blessure sur la paternité, j’ai demandé pardon.
“Oui, je suis fils de Dieu”
J’idéalisais la paternité, je me disais c’est sûr ça sert à rien d’être papa, vaut mieux être un papa parfait. Je me suis rendu compte qu’effectivement fallait que je prie pour cette famille que je voulais fonder. Je n’arrivais pas à la fonder, je pouvais pas me marier, je sentais qu’il y avait cette blessure. Donc j’ai demandé pardon et j’ai la très grande joie de m’être marié maintenant. Ça fait 4 mois, mon épouse compte les mois, elle me dit que c’est nos noces de coton tige. Quatre mois de mariage ça m’apprend que Dieu fait de grandes choses. Il est venu guérir une blessure pour laquelle j’ai prié. Le moment où j’ai senti que c’était ma vocation de me marier, c’est le moment où j’ai vraiment senti que j’étais rétabli dans cette idée de paternité. Oui je peux être un papa, c’est très naturel, oui je suis fils de Dieu je peux me marier je peux avoir des enfants y’a pas de soucis, je serai peut-être pas un papa parfait, mais je vais tout faire pour le faire avec l’aide du Seigneur.