Durant les vingt premières années de ma vie, je ne me suis posé que très peu de questions sur l’existence de Dieu. Les églises m’intéressaient d’un point de vue architectural, pas plus. Disons que Dieu était presque un gros mot dans ma bouche.Et puis à l’âge de 20 ans, j’ai avorté. Ce n’était pas un avortement de détresse, mais “de confort”: Les études, l’immaturité de mon couple, l’envie de profiter de ma jeunesse. En outre mes parents seraient tombés des nues, je ne pouvais pas leur faire cela. À aucun moment, le planning familial ne m’a montré qu’un autre choix était possible. On m’a dit : « Il sera bien temps de refaire un bout de chou plus tard. » Ok, super, allons-y.
Je comprends enfin la source de mon mal-être : je ne supporte pas mon avortement. Ce fardeau est tellement lourd à porter pour une jeune femme qui veut devenir mère !
Les cinq années après cet événement sont passées sans heurts, dans la joie même. J’avais soigneusement enterré cet événement au plus profond de ma conscience. Puis, avec celui qui deviendra mon mari, nous avons décidé d’avoir un enfant, « pour de vrai » cette fois. Très vite enceinte, je ressens un profond malaise et, à deux mois et demi de grossesse, je fais une fausse couche. Mon corps essaie de me dire quelque chose, mais je n’entends pas. Je me retrouve enceinte quelques mois plus tard et, au même terme, nouvelle fausse couche. Ce terme, c’est celui auquel j’ai avorté. Après une période d’insomnies peuplées de cauchemars culpabilisants, d’angoisses inexpliquées, je comprends enfin la source de mon mal-être : je ne supporte pas mon avortement. Ce fardeau est tellement lourd à porter pour une jeune femme qui veut devenir mère !
J’ai décidé à ce moment-là de tout faire pour aller mieux. J’ai contacté une association spécialisée dans l’accompagnement des mères en deuil (AGAPA). Pendant un an, j’ai été épaulée pour m’aider à cicatriser cette blessure. À la fin du parcours, j’allais effectivement mieux. Mais il me manquait encore quelque chose d’essentiel que je ne parvenais pas à trouver.
J’ai déposé mon fardeau, et je me suis sentie libérée pour la première fois depuis de nombreuses années.
En 2012, le grand-père de mon mari décède. Et là, le plus simplement du monde, pendant la célébration à l’église, mes yeux sont tombés sur un Christ en croix. J’ai ressenti comme un attrait, une chaleur. Je me suis dit : « Tiens, il y a peut-être quelque chose à creuser par là… » Deux jours plus tard, j’ai démarré un chemin vers le baptême. Pendant deux ans, j’ai étudié la Bible, j’ai pris goût à la messe, j’ai beaucoup échangé avec mon accompagnateur et d’autres personnes se préparant au baptême comme moi. Ils étaient de tous âges. J’étais étonnée de voir autant de gens si différents demander le baptême. Au cours de ce chemin, soutenue par mon mari, la foi m’est venue, tranquillement. Au début, c’était une toute petite flamme vacillante. Et puis elle s’est renforcée au fur et à mesure des rencontres, des lectures, des questions, et aussi des grâces reçues que j’acceptais enfin de voir ! J’ai été baptisée à Pâques 2014, à l’âge de 28 ans. J’avais enfin trouvé ce qu’il me manquait pour « guérir » de mon avortement : le pardon de Dieu ! Je l’ai cherché, ce pardon, et je l’ai reçu. J’ai déposé mon fardeau, et je me suis sentie libérée pour la première fois depuis de nombreuses années. Se pardonner à soi-même reste le plus difficile…
Même si ma foi n’est pas linéaire, je ne pourrais jamais revenir en arrière.
Parallèlement, mon mari a démarré un parcours vers la confirmation. Et nous avons été confirmés ensemble à la Pentecôte qui a suivi mon baptême. Et dire qu’avant, je ne voulais pas entendre parler de religion ! Aujourd’hui, j’ai tellement senti que Dieu m’aimait et qu’il m’avait pardonné (il nous a même confié une petite fille) que j’ai confiance en lui. Même si ma foi n’est pas linéaire, je ne pourrais jamais revenir en arrière : c’est trop bon de se savoir aimée pour l’éternité !