Je m’appelle Géraldine. De mon enfance, je me rappelle avoir été à la messe de Noël avec mes grands-parents, pour les petits gâteaux à la fin, le chocolat chaud. Après, on allait à la messe pour les mariages, les enterrements, mais c’est à peu près tout. On ne parlait jamais de Dieu à la maison, on ne priait pas. Et l’ambiance était plutôt tendue : mes parents ne s’entendaient pas du tout. Et, quand j’ai eu 16 ans, ils ont divorcé dans des circonstances très difficiles. Donc, j’en ai beaucoup voulu à mon père. Je l’ai rejeté à ce moment-là.
Donc j’avais 16 ans. Et à 17 ans, mon petit copain a décroché : il faisait de l’alpinisme et il a décroché de 50 mètres. Il est tombé et il est mort. Ces deux évènements, à deux années successives, ont été très déterminants pour moi, puisque je me suis dit : « L’amour n’existe pas. À quoi bon s’attacher ? Vivons ! » Et donc, j’ai commencé des études supérieures en faisant la fête. Et surtout, je ne voulais pas m’attacher. Donc, je multipliais les conquêtes. Je multipliais les conquêtes et, à partir du moment où on me disait, on me manifestait qu’on voulait s’attacher un peu plus, que ça dure un peu plus, à ce moment-là, je partais. Donc, ça a duré quelques années comme ça.
Et puis un matin, j’avais 22 ans, je me suis regardée dans le miroir, et je me suis dit : « Oh là, là, ma vieille ! Comment tu vas finir ? Tu vas finir moche et seule ! » Et, en même temps, je ne savais pas quoi faire pour changer de vie : j’en étais incapable !
Et, à la fin de mes études, donc j’étais à l’université, j’ai eu un examen oral avec un professeur de philosophie. Et, quand il m’a posé une question, je lui ai répondu : « Je ne sais pas. Je m’en fous ! » Et là, il m’a regardé, il m’a dit : « C’est pas grave, je vous en pose une autre. » Et, à ce moment-là, il m’a posé une question qui était sur la liberté religieuse. Et là, je ne sais plus ce que je lui ai dit : j’ai dû, probablement lui poser mes questions ou mes interrogations, mon désarroi. Toujours est-il qu’il m’a donné 19/20 à mon examen. Et en plus, il m’a invité dans un rassemblement de jeunes chrétiens. Il m’a dit : « C’est super ! Vous allez voir, c’est très joyeux, très bon enfant. » Et en même temps, il y avait son nom sur le tract, parce qu’il y faisait une conférence.
Donc, un petit peu pour lui faire plaisir, mais un petit peu aussi par curiosité, je me suis rendue dans ce rassemblement. Donc, je suis arrivée dans ce lieu, hall de rassemblement, où il y avait 5 000 jeunes, de plusieurs nationalités différentes. J’avoue que l’ambiance m’a bien prise. Et à la fois, je me suis senti un petit peu à côté, parce que tous ces jeunes étaient heureux, joyeux, ils frappaient dans les mains, ils manifestaient vraiment une joie débordante. Et moi, j’étais triste comme les pierres. Je me dis : « Pourquoi eux mais pas moi ? » Les logements étaient très précaires. Et moi, je me suis retrouvée dans l’infirmerie. Donc, on m’avait mis dans le lit de l’infirmerie. Et tous les matins, je devais faire mon sac pour laisser la place, éventuellement, aux malades. Donc, tous les matins, je me disais : « Je me casse ! Je m’en vais. Je ne comprends rien. Ils sont tous fous ! » Et, en même temps, j’avais envie de rester.
Au troisième jour, il y a eu une petite phrase qui parlait de confession. Alors, je ne savais pas exactement ce qu’était la confession, mais je me suis dit : « Je pourrais peut-être essayer », parce que ce qu’ils en disaient, c’est qu’on accédait de plus en plus à Dieu chaque fois qu’on se confessait. Donc, je me suis dit : « Ce Dieu, je ne le connais pas. Visiblement, c’est lui qui fait vivre ces jeunes. Je vais essayer ! »
Donc, je suis allé me confesser et j’ai dit au prêtre : « Je viens me confesser parce que j’ai oublié Dieu dans ma vie. » Et en vrai, il m’a aidé à me confesser. Moi, j’ai aussi pu dire tout ce qui m’avait blessé, tout ce qui m’avait fait mal dans mon enfance, dans mon adolescence, dans ma jeunesse, tout ce avec quoi je luttais et que je n’arrivais pas à mettre en place. Et je me souviens qu’à la fin, quand il m’a donné le pardon de Dieu, d’un seul coup, mais d’un coup d’un seul, j’ai compris que Dieu m’aimait. J’ai compris qu’Il m’avait donné un cœur qui était fait pour aimer et pour recevoir de l’amour, et pas pour le gaspiller.
Donc, quand je me suis relevée, je me suis senti complètement différente et je me suis senti prête à vivre une autre vie. Pour pouvoir y arriver, je me suis dit : « Je ne vais pas rentrer chez moi. Par ce que, si je rentre dans mes habitudes, mon petit contexte, ça va peut-être être un feu de paille ! » Et donc, j’ai décidé de rester là. J’ai décidé de rester dans ce lieu. On me proposait de vivre pendant une année avec d’autres jeunes, avoir des temps de formation, des temps de mission dans des paroisses, etc. Et je me suis dit : « Ça, c’est bien ça ! Bien pour moi ! »
Donc, j’ai passé une année, un petit peu à l’écart comme ça, année pendant laquelle j’ai appris à vivre avec les autres : alors ça, c’était le plus dur parce que je m’étais construite moi-même, finalement, et puis j’avais construit ma petite vie ; j’étais assez égoïste. Et là, il a fallu partager. Il a fallu faire les repas et la vaisselle avec d’autres, aller se coucher à des heures raisonnables pour laisser les autres dormir, et surtout, entrer en relation vraie et se laisser aimer, ce dont je n’avais pas du tout l’habitude.
Donc, au cours de cette année, j’étais tellement remplie de joie, j’étais tellement remplie d’amour que je me suis dit : « Le vrai amour, c’est Dieu, quand même ! » Je m’étais mis en tête de devenir bonne sœur et de vivre toute seule, dans un ermitage, dans la montagne…dans un lieu désert.
Et, au fur et à mesure des évènements, des rencontres, des discussions, je me suis rendu compte que c’était une fuite. Et, dans le groupe d’amis avec lesquels j’étais, il y avait un jeune homme qui n’était pas du tout mon style mais que, à un moment donné, j’ai regardé autrement. Et puis, j’ai pu dire à un moment, à Dieu : « Écoute, si c’est la vie religieuse que tu veux pour moi, c’est super ! Je pars tout de suite. Si c’est le mariage, il va falloir que tu m’aides ! »
Et c’est ce qui s’est passé parce que nos sentiments se sont rejoints et on a pu commencer un chemin tous les deux. Et je ne regrette absolument pas ce chemin, même si, au début, ça a été très difficile pour moi de me laisser aimer : il a fallu que mon mari soit très patient, qu’il m’apprivoise. Mais je peux dire vraiment que Dieu m’a réconcilié avec l’amour humain également.