Qu’est-ce que cette fraternité universelle ? Pourquoi diable serait-il mon frère, cet homme que je ne connais ni d’Eve, ni d’Adam ? Mme Eve et M. Adam que je ne connais pas d’ailleurs. Comment l’humanité serait-elle fraternelle ? L’a-t-elle toujours été avec moi ? Certes non ! Et lorsque j’ose écouter cette voix intérieure, cela me demande tellement de courage... Osons la question : cette fraternité n’est-elle pas qu’un doux rêve hippie ?
L’autre jour j’étais aux 20 ans d’une association qui œuvre au sein des quartiers prioritaires. Son nom ? Le Rocher, oasis des cités. Sa devise ? « Oser la rencontre, choisir l’Espérance. » Au milieu des cris d’enfants et des sourires d’adultes, des chamboules-tout et des repas partagés, j’ai repensé à cette année de volontariat que j’avais passée au Rocher de Bondy. J’ai repensé à Jamila, Justin, Mohamad et Gurnor. Je me suis souvenu de ces repas saveurs du monde où l’on rencontre l’autre par le partage de sa culture culinaire. J’ai repensé à ces animations de rue où des gamins de tous pays et toutes religions apprennent à jouer, et par là à vivre, ensemble. J’ai repensé à ces centaines d’heures d’aide aux devoirs, ces milliers de cafés offerts les jours de marché et ces non moindres milliers d’échanges. Alors, au cœur de cette kermesse géante d’anniversaire, j’ai entendu ce cri murmuré (ou ce murmure crié) : oui, la fraternité est possible. « L’autre, mon frère » peut être réalité.
En tant que croyant, je vois en Dieu le Père de tous les hommes. J’ai fait l’expérience que ce Père céleste n’a que les perfections de la paternité. Attention, force et encouragement. Pédagogie, exigence et bienveillance. Je n’y retrouve pas les manquements, défauts ou absences de mon père terrestre. Ce Père du Ciel m’accueille et m’attend, m’écoute et me conseille. Par la vie, les rencontres, la prière, les sacrements et l’amitié des Ecritures de la Bible. C’est un jour à la fois, petit à petit. Notre relation filiale avance.
En tant que disciple du Christ, je vois en Jésus mon frère et notre frère.
Bien sûr, la fraternité est difficile. Les freins sont légions ! Les expériences négatives sont tenaces ! Et pourtant, chaque frein dépassé procure une grande joie; chaque rencontre faite crée un élan nouveau pour oser la fraternité ; chaque fraternité entretenue est un baume sur mon coeur blessé. Chaque pas fait vers mon frère, ma sœur, me rapproche de Dieu, me met en Dieu.